RY COODER : The Prodigal Son (2018)

Ry Cooder est un musicien curieux qui a abordé un nombre invraisemblable de musiques pendant sa longue carrière.

Reconnu très tôt comme un virtuose de la slide, il scotche tout le monde avec la bande originale du film de Win Wenders, Paris-Texas. Ses notes portent le film, magnifiant les performances des acteurs, et sublimant les scènes dans le désert.

C’est aussi avec le cinéaste allemand qu’il part à Cuba pour retrouver les papys cubains en permettant à des musiciens exceptionnels comme Compay Segundo de faire le tour du monde en connaissant un succès tardif mais mérité avec Buena Social Club.

Et ses albums solos, ses collaborations avec des musiciens de tous horizons au hasard (Captain Beefheart, les Rolling Stones, Ali Farka Touré, Taj Mahal, David Lindley, Flaco Jimenez…) lui permettent d’ouvrir son univers musical à toutes sortes de musiques différentes.

The Prodigal Son est son premier album depuis six ans, et il jouera à l’Olympia en octobre, sa dernière venue, dans cette même salle, datant de 2009 avec son compère Nick Lowe.

Avec son fils Joachim qui compose et joue depuis de nombreuses années, il puise dans le vaste répertoire de la musique US, du gospel, du blues, du R & B. Miraculeusement le cocktail de tous ces styles donne un album très uni et parfaitement agencé.

Ainsi "Nobody's Fault sauf Mine" écrit par Blind Willie Johnson, et magnifié dans les versions live et sauvages de Led Zeppelin, est superbement reprise, et son tempo plus cool n’empêche pas de faire passer un merveilleux frisson quand le slide illumine le morceau. Et ces paroles venues des temps anciens avec « Everybody Ought To Treat A Stranger Right » cet autre reprise du bluesman, qui résonne parfaitement dans l’Amérique actuelle.

De même sous son bonnet de laine enfoncé jusqu’aux oreilles, Ry n’oublie pas Woody Guthrie, qu’il a repris voici très longtemps, avec une forme d’hommage dans « Jesus and Woody ».

Le grand talent d’arrangeur de la famille Cooder est toujours bien présent dans «Harbour of Love» des Stanley Brothers un spiritual au tempo ralenti et qui sonne comme une nouveauté.

Notre homme compose encore (trois chansons sur cet album) et "Shrinking Man » baigne dans une ambiance très New Orleans bourrée d’humour et de sérénité.

Et le titre éponyme, un traditionnel sonne comme un bel hommage du père au fils, unis par l’amour de la musique

Comme souvent, il est difficile de classer cet album dans une catégorie, tant les genres se mélangent, et c’est la grande force de ce musicien hors-pair, touche à tout de génie, arrangeur brillant, grand connaisseur des musiques du monde.

Ry Cooder est de retour fidèle à lui-même, proposant une musique variée, magnifiquement interprétée et c’est vraiment une sacrée bonne nouvelle !

Michel Bertelle